Le choix de ses partenaires

Je voudrais parler ici de la manière dont les gens se choisissent lorsqu’ils débutent une relation romantique, intime ou amoureuse. Ce que je trouve fascinant, c’est qu’on s’imagine souvent que les relations « arrivent » toutes seules. En réalité, la manière dont on se choisit, en tant qu’amoureux ou partenaires de vie, dit beaucoup de nous. Bien souvent, ces rencontres sont intuitives, instinctives. Il n’y a pas toujours une réflexion consciente sur ce qui est en train de se jouer. Sur le besoin d’attachement qu’on est en train de nourrir. Sur les schémas relationnels que nous rejouons, plus ou moins à répétition.

Et puis, il y a aussi cette manière dont on s’arrime à quelqu’un — pour durer, ou pas. La manière dont on continue à vivre ensemble, à faire relation. J’ai toujours trouvé intéressant de me poser régulièrement cette question : est-ce que, si on se rencontrait aujourd’hui, on se rechoisirait ?

Dans More Than Two, qui explore les multiples facettes des relations plurielles et non exclusives, il y a un chapitre très éclairant sur les rencontres et le choix des partenaires. Les deux autrices y proposent une série de questions que j’ai traduites ci-dessous, et que je trouve coachantes. Elles sont très intéressantes au moment de débuter une relation, mais aussi pour interroger une relation existante. En les lisant, tu peux réfléchir à ton ou ta partenaire du moment, et en miroir, tu peux aussi les retourner vers toi : est-ce que mes partenaires me perçoivent comme cela ?

L’importance du choix

L’idée que nous ne choisissons pas nos relations est étonnamment répandue. Compatibilité, vision partagée, relations négociées mutuellement — tout cela semble secondaire face au fameux « coup de foudre ». Le langage courant est révélateur : on « tombe amoureux ». Beaucoup racontent qu’une histoire leur est « tombée dessus ». Quand on tombe amoureux, on est obligé de commencer une relation. Et une fois engagé, c’est l’amour qui est censé alimenter toute la relation. Tant qu’on est amoureux, on sera heureux. Beaucoup d’adultes croient encore à cela.

Mais si on accepte cette idée, alors on risque de se retrouver dans des relations par défaut, et non par choix. On peut finir avec quelqu’un qui ne nous correspond pas vraiment, tout simplement parce qu’on n’a jamais pris le temps de se poser les bonnes questions.

Je ne parle pas de compatibilité superficielle. Ce n’est pas une question de goûts musicaux ou de destinations de vacances. Je parle de questions profondes : notre rapport à la vie, au plaisir, à la relation. Des choses bien plus déterminantes dans une co-construction à long terme.

Choisir est une compétence

Oui, choisir un partenaire est une compétence et cela s’apprend. Cela commence par reconnaître que nous avons du pouvoir dans nos choix. Même si la liberté n’est jamais absolue, nous pouvons agir sur les liens que nous construisons.

L’amour seul ne suffit pas à garantir une relation saine. Une relation de qualité se cultive — mais elle commence par un bon terrain. 

Connaître ses « non négociables »

Une partie essentielle de cette compétence consiste à connaître nos points rédhibitoires : ce qui ferait d’un partenaire un très mauvais choix pour nous.  L’incompatibilité sexuelle en est un fréquent ; l’abus de drogues ou d’alcool, un autre. L’histoire de violence avec des ex-partenaires en est un aussi. Mais d’autres signaux sont plus subtils.

Quand on choisit un partenaire, il y a parfois une étrange zone floue : la personne ne déclenche aucun signal d’alerte, mais on ne ressent pas non plus un réel enthousiasme. Si nos choix se basent uniquement sur l’absence de “red flags”, on peut foncer dans une relation sans vraiment se demander si la personne a les qualités que nous souhaitons chez un partenaire.

Le principe du « Carrément oui ! »

Une bonne règle en matière de choix de partenaire, c’est “Carrément oui !” ou “non”. Cette règle, formulée par l’écrivain Mark Manson, part de l’idée qu’il est absurde d’investir du temps et de l’énergie romantique dans quelqu’un pour qui on ne ressent pas un “Putain oui !” enthousiaste. Si la simple idée de sortir avec quelqu’un ne te fait pas vibrer, alors c’est non. Il n’y a pas de place pour l’ambivalence en amour.

D’ailleurs, cette règle s’applique aussi au consentement sexuel. Tout ce qui n’est pas un oui franc est un non. Un oui timide, un silence, une hésitation… ne sont pas des consentements valables. Alors pourquoi ne pas appliquer le même principe au fait de se lancer dans une relation romantique ?

Tu peux tout simplement appliquer le même principe à l’engagement dans des relations romantiques. Si ce n’est pas un oui franc et clair que tu sens à l’intérieur de ton cœur, alors pose-toi quelques questions supplémentaires ! dans quelle histoire es-tu en train de t’embarquer ?

Des questions puissantes à se poser

Je préfère me demander ce que cette personne apporte à ma vie, plutôt que de traquer ses défauts. Voici les questions proposées dans More Than Two, que je trouve précieuses :

  • Cette personne possède-t-elle une forme de sagesse que je trouve attirante ?
  • A-t-elle fait quelque chose qui montre que, face à une décision difficile, elle choisira la voie du courage ?
  • A-t-elle montré, face à une peur ou une insécurité personnelle, qu’elle s’engage à les affronter avec honnêteté, et à faire l’effort de les comprendre et de les dépasser ?
  • Fait-elle preuve de curiosité et de rigueur intellectuelle ? Montre-t-elle de l’envie de grandir ?
  • A-t-elle abordé ses anciennes relations, y compris celles qui ont échoué, avec dignité et compassion ?
  • Est-ce une personne joyeuse ? Valorise-t-elle le bonheur personnel ? Me fait-elle ressentir de la joie ?
  • Montre-t-elle un engagement continu dans la connaissance et la conscience d’elle-même ?
  • Valorise-t-elle l’autodétermination pour chaque partenaire de la relation ?
  • Aborde-t-elle les choses avec énergie et enthousiasme ? Est-elle engagée dans le monde ?
  • Fait-elle preuve d’intégrité personnelle ?
  • Est-elle ouverte, honnête, curieuse et enthousiaste sur le plan sexuel ?
  • Communique-t-elle de manière transparente, même quand c’est inconfortable ?
  • Cette personne laisse-t-elle les cercles sociaux qu’elle fréquente en meilleur état qu’elle ne les a trouvés ?

Un autre indicateur : comment elle parle de ses ex ?

Un détail révélateur : comment cette personne parle-t-elle de ses ex ? Sont-ils tous des monstres ? Chaque histoire est-elle un conte tragique où l’ex joue le Grand Méchant Loup ? Cela peut signifier que, si tu te mets en relation avec elle, tu auras le rôle principal dans la prochaine tragédie. À l’inverse, une personne qui entretient des relations cordiales avec ses anciens partenaires en dit long.

Observe aussi ses relations actuelles, s’il y en a. Sont-elles stables et sereines ou chaotiques et colériques ? Apprécies-tu la manière dont elle traite ses partenaires actuels ? Parle-t-elle d’eux avec respect et bienveillance ? Si oui, il y a de fortes chances qu’elle te traite de la même manière.